samedi 20 avril 2013

Hollande, homophobe ?

Publié le 19 avril 2013 sur le site Boulevard Voltaire


On peut être rompu à la mauvaise foi journalistique, il est des moments où la duplicité du bobardier de service ferait sortir de ses gonds la meilleure des natures. Sur France 5, lors de son émission du 13 avril dernier, Paul Amar étala sentencieusement devant Béatrice Bourges les visages tuméfiés du couple d’homosexuels parisiens tabassés dans le XIXe arrondissement. Une rouerie de plus, pour cette caste médiatique qui distille la bonne parole comme en d’autres temps l’Église la sainte absolution ; il est clair que la recrudescence des violences homophobes ne peut être due qu’aux manifs pour tous et autres printemps français.
 

Béatrice Bourges rappela pourtant la « violence absolument considérable » qui sévit aujourd’hui dans le pays. Qui oserait dire en effet qu’un couple, homo ou hétéro d’ailleurs, peut à toute heure baguenauder impunément la main dans la main, dans tous les quartiers et au vu de toutes les populations ? Le « changement de civilisation », si cher à dame Taubira, ça commence par l’insécurité pour tous.

Mais, comme pour chaque grosse ficelle qui se respecte, il faut bien que le journaleux fasse sa pelote d’un fond de vérité ; la progression de l’homophobie en France est à ce titre incontestable.

Seulement, à qui la faute ? Quand un pouvoir se défausse sur une minorité-alibi comme faire-valoir d’une politique destructrice des fondements vitaux de la société et qu’il use des tensions qui s’ensuivent pour masquer sa propre impuissance face aux vrais problèmes, n’est-on pas dans un jeu de dupes ? En propageant la fable de l’aspiration des gays au mariage par le truchement d’associations lilliputiennes à sa botte, il instrumentalise les homosexuels en les plaçant sciemment en situation d’accusés, sans souci des conséquences, et il fait ensuite mine de s’étonner d’une réaction condamnable qu’il a ainsi sollicitée. Alors, du manipulé ou du manipulateur, du peuple ou du pouvoir, lequel est homophobe ?

Ce pouvoir malveillant assène enfin sans vergogne que le grand chambardement qu’il entend imposer contre vents et marées serait pour l’égalité des droits.

Bobard, encore !

Ou alors, le droit de faire les pitres devant monsieur le maire, de parader enturbannés en décapotable blanche comme les regrettés Coluche et Le Luron. Mais en leur temps, c’était de la parodie. Demain, tout couple homosexuel qui n’a pas d’emblée vocation à la débauche carnavalesque devra se plier, bon gré mal gré, à cette pantalonnade s’il souhaite se prémunir des atteintes de la vie : il n’aura pas le choix.

Et que dire quand le couple ainsi dûment enregistré à l’état-civil abordera une frontière un peu exotique où le policier de l’immigration demandera, goguenard, lequel des deux fait l’homme ou la femme ?

Un PACS amélioré, n’eût-il pas été plus discrètement approprié si l’on avait sincèrement voulu permettre à tout un chacun de désigner la personne de son choix pour bénéficier des protections réservées jusque-là au conjoint légal ?

En optant a contrario pour la voie aussi burlesque que conflictuelle du Mariage pour tous, le pouvoir peut être sûr que, par peur du ridicule ou des représailles, les intéressés ne se presseront pas au portillon.

Serait-ce que les libéralités induites d’une vraie extension des droits, fiscaux notamment, rebutent nos impécunieux dirigeants ? C’est bien beau de promettre la lune, mais livrer ainsi les homosexuels à la vindicte des naïfs pour une filouterie de plus, n’est-ce pas de l’homophobie, ça ?

Monsieur Hollande, vous qui, par votre fonction, personnifiez l’incurie de ce pouvoir combinard, méfiez-vous qu’on ne vous accuse un jour d’être un homophobe. Mais peut-être plaiderez-vous alors que vous étiez responsable mais pas coupable…